Le matin ici decida de se lever incertain, dans une lumiere entre jaune et un gris lis, comme d'une peinture a l'huile encore mouillee. Les nuages paraissaient suspendus avec des fils freles, et le soleil aussi n'etait pas sur s'il allait quitter les ombres de la nuit anterieure. Je venais de sortir d'un reve troublant, plein d'hallucinantes visions, ou je marchais seule sur une autoroute direction d'Austin, la capitale du Texas, ou j'ai fait mes etudes universitaires entre 1977 et 1987, avant de demenager a Olympia, Washington, avec mon mari americain de San Francisco, qui lui aussi faisait des etudes de maitrise, dans la psychologie, pendant que moi j'ai obtenu une maitrise en litterature espagnole et latine americaine. Dans les annees de solitude qui allaient suivre, j'etais visitee regulierement par des reves inquiets, un monde que je connais bien depuis mon enfance, comme enfant serieuse et souvent seule, curieuse des un tres jeune age dans le monde des livres et des arts. Mes reves sont depuis toujours comme des films Fellini, surreel, angoissant, vifs, pleins de symbolismes, et toujours envahis d'architectures surreelles, grotesques, et des personnages a toujours inconnus, qui ou me tourment et se moqent de moi, ou qui aussi parfois essaient de m'aider de trouver mon chemin de retour. Souvent, ce chemin de retour est vers Austin, ou depuis la mort de mon pere en 2008, vers ma maison a Beveren, le village ouest- flamand ou je suis nee, et que j'ai quittee a l'age de 19 ans, sous l'admonition de mon pere, pour aller etudier aux Etas Unis. Le reve, qui bordait a un cauchemar, me trouvait seule sur une autoroute poussiereuse, vers la capitale de Austin. J'avais la complication additionnelle d'une grande valise lourde, et mon but etait d'arriver a mon dortoir universitaire, avant le debut des cours pour le semestre, un but qui paraissait extremement difficile, pour le fait que j'etais a pied. Un point interessant de mes reves, cela n'est jamais clair quel est le point de depart de ma route, qui parait toujours interminable, pleins de dangers d'une circulation chaotique et frenetique, de camions nerveux, d'equipes de construction, de tempetes de pluie, d'avions meme qui laissent tomber des bombes, et moi, qui invisible a toutes les personnes autour de moi en voitures, en bus, en taxis, avance, avec une determination inalterable d'atteindre mon but. Hier soir, dans le reve, j'ai rencontree deux femmes gentilles, qui vivaient dans la rue, et qui avaient l'apparance un peu effrayante, pour des maquillages grotesques, mais je leur notais un coeur sincer, et elles m'on aidee d'identifier la direction de part du chemin que je chercheais a trouver. Je crois que part de leur presence dans mon reve troublant s'explique par la presence croisante des personnes sans abri ici a Olympia, et l'attitude cruelle des authorites civiles et policieres, qui a chaque fois chassent ces personnes les plus meprisees et vulnerables du pays, et meme detruisent leurs si pitoyables camps, ou on coupe meme les arbres, pour eviter que ces pauvres ames aient un peu de privacite et dignite quand ells se couchent exposees aux elements et l'indifference du monde. Souvent, sur la route de mes reves inquietants, ce sont des personnes de qui je vois qu'elles ont souffert, qui decident d'essayer de m'aider. Un de mes reves, celui ne pas inquietant, est de pouvoir un jour visiter le grand Sud algerien, de visiter Timimoun, Tamanrasset, le parc immense et de renommee mondiale du Tassili 'n Ajjer, sutout depuis que j'ai vu les payasages surreels anciens satures de mystere et esprits de fables, dans les photos y pris par le photographe d'Aokas, Kurt Lolo, qui m'a inspiree mon livre qui celebre sa photographie de lumieres et mythologies envoutantes, "MAGIE ET MYSTERE" de mars 2019.
La photographie de Kurt Lolo, a deux traits de signatures uniques: celui de savoir rendre la lumiere et toutes ses nuances avec une precision magique, aux rythmes fluides et presque insaisissables, et celui de savoir creer une ambiance de theatre, de mystere, qui evoque le monde des mythologies anciennes, dans ses paysages, surtout ses paysages ensorcelants du grand Sud algerien. Les photos des paysages de l'Assekrem de la part de Kurt Lolo ont un impact decisif, ou le monde du theatre s'unit au monde des montagnes en sculptures aniennes qui tranportent a un monde de silences sacres, qui sont la clef d'histoires insaisissables, de secrets qui ont su evader les lois de l'espace et du temps, et qui sont transmis dans les heritages de fables, de connaissances, et de reverences des cultures Touareg. Peut - etre, c'est eux que je cherche dans mes reves inquietants toutes ces annees. La premiere photo des cultures de l'Afrique du Nord que j'ai vu comme enfant de ni douze ans, fut un portrait en couleur d'un guerrier Touareg, dans une des magazines de National Geographic que collectionnait avec une passion decisive mon pere. Cette photo fut mon introduction aux peuples berberes de l'Afrique du Nord, et je me rappelle jusqu'a aujourd'hui, le regard fier et franc de cet homme d'une quarantaine d'annees, dans ses robes d'un bleu brillant et indigo, des yeux ou brillait la lumiere des mysteres du Sahara, et cette memoire m'est restee. L'Algerie est le pays qui m'a accueillis mes poemes, mes livres, mon art, et de qui son coeur, son ame s'est mis telle un filigrane dans les battements de mon coeur et ses reves, ses inspirations, ses joies, ses chagrins, ses espoirs, et son envie brulante pour une identite reclamee. Elle est ma muse benevolante, et sans elle, les reves inquiets ne sont jamais tres loins. Je tiens a remercier a Kurt Lolo pour son talent d'unir la magie de ses lumieres dans sa photographie, et pour son talent de mettre au centre, tel sur une scene de theatre ancien, l'importance de la mythologie comme une presence integrale du coeur et esprit des cultures berberes de l'Algerie, et pour la facon que cette sagesse ancienne, ancestrale, se manifeste dans le coeur kabyle avec telle fierte et dignite. Les photographes d'Aokas occupent une place centrale dans mon coeur de poete flamand en exile perpetuel, et la photographie de Kurt Lolo m'a appris aussi la valeur d'une amitie pour toutes saisons. Il y a des moments ou je me trouve frustree, de vivre si loin de ma Kabylie, de devoir rester patiente avec les longues distances qui compliquent tout, pour ecrire mes poemes, mes livres, pour les partager, pour faire et partager mon art que m'inspirent les photographes d'Aokas avec qui je travaille depuis 2017, a 9000km, ici, a Olympia, dans le Pacifique Nord - ouest des Etats Unis. L'autre jour, envahie par une nostalgie et desir irrepressible de vouloir traverser cette distance considerable, j'ai telephonee a Kurt Lolo, et je reste impressionnee par le tact avec lequel il a ecoutee et absorbee ma detresse. Comme le coeur et esprit berbere, il n'y a aucun, et mes dix livres qui celebrent la culture et l'art de mes amis et collegues berberes en Kabylie en sont la preuve incontestable. C'est le coeur ancien et resistant de la Kabylie qui me guerit et inspire chaque jour a nouveau, et la distance immense entre Olympia et ma Kabylie, je la traverse, de jour dans mes ecrits, et de nuit, dans le monde de mes reves, meme si cela veut dire que j'y souffre pour le fait que je suis toujours en route vers le monde de mes camarades berberes qui sont devenus ces dernieres 5 annees, les fibres, le souffle, la raison d'etre de mes livres, de l'histoire de ma vie. La Kabylie et mes collegues artistes - photographes d'Aokas, sont l'equilibre finalement me permis, finalement compris, de toutes les joies et tous les chagrins que m'a exigee ma vie de poete en exile culturel et intellectuel - artistique. Mes pieds marchent ici de jour sur les routes de Olympia, et ne s'y sentent que mal a l'aise, et la nuit, mes pieds et mes imaginations se mettent en route, essayant avec ma valise de poemes, de regrets et peines, et espoirs et joies, de trouver le chemin de retour vers la Kabylie et ma famille de collegues et amis berberes, une route longue, qui parait aller de Olympia bien au - dela de la Kabylie, vers les horizons envoutants du Tassili 'n Ajjer, ou peut - etre un guerrier Touareg me laissera un message de mes camarades photographes Djamil Diboune, Katia Djabri, Kurt Lolo et Nacer Amari, pour qui le jour se leve a Aokas et de qui me parlent les nuages, soudain blancs ici dans le ciel, bleu soudain aussi, de mon jardin ce matin ou le soleil vient de chasser le gris et les ombres de la nuit inquiete et seule.
Trudi Ralston
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