Friday, September 19, 2025

Le Retard Imprevu: Une Mecanique Charitable - dans la serie "Les Ailes d'Aphrodite"

        Il y a un phenomene qui recemment s'est introduit a mes pensees, le fait que la defense contre le chagrin de l'absence s'exprime parfois de facon bizarre, et pourtant ne pas incommun: quand toute autre emotion, celle de la joie, du delire, de l'energie debordante, n'a plus de chemin libre d'expression, ce qui reste est la peine, et la douleur de sa blessure, et face a cette evidence, le coeur humain reagit par s'accrocher a cette douleur et de la proteger, car, une fois que cette douleur meurt, il ne reste plus rien du lien, que la memoire de son histoire. La musique des blues inventee par les artistes genies de la population noire des Etats Unis, explore de facon magique et profonde cette verite et ses contextes autant tragiques que rebelles, courageux. Je pense a une chanson blue celebre sur ce sujet: la chanson "Good Morning, Heartache" (1946) de la chanteuse fameuse Afro - americaine Billie Holiday (1915 - 1959), persecutee sans piete pour ses chansons qui condamnaient le traitement de la population noire, comme la chanson qui fut bannie "Strange Fruit" de 1939, qui decrit les lynchings de personnes noires, dans le Sud du pays qui continueraient jusqu'aux annees 1960, avec l'arrivee du Mouvement pour les Droits Civils sous la direction de leur leader heroique, Dr. Martin Luther King, Jr. (1929 - 1968). La chanson etait a base d'un poeme et chanson d'Abel Meerpol, de 1937. Je pense a cette chanson blue de Billie Holiday, de 1946, "Good Morning, Heartache", ecrit par Irene Higginbottam, Ervin Drake et Dan Fisher. Le titre se traduit comme "Bonjour, Chagrin de Coeur", ou elle parle a ce chagrin comme si c'etait une personne, qui lui visite chaque matin, et a la fin de la chanson elle l'invite de rester: "Good Morning, heartache... Sit down.", donc: "Bonjour, chagrin de coeur, ... assieds - toi." Elle invite alors son chagrin de rester, fatiguee d'essayer de le chasser, parceque quelque part elle accepte la realite, que c'est tout ce qui lui reste a son coeur qui a un temps etait heureux, avait la joie, l'espoir de se savoir aimee. Une chanson tres touchante, vu que Billie Holiday a vecue souvent des liens abusifs de la part des personnes proches dans sa vie. On sent, en ecoutant cette chanson melancholique qu'elle connaissait tres bien ce sujet. Cela fait 6 ans depuis mon sejour au Maroc et en Algerie, specifiquement la Kabylie, et cela ne prend pas beaucoup, pour sentir ce manque, qui se manifeste toujours de facon inattendue, mais aussi maintenant deja connue: parfois il suffit d'entendre une chanson kabyle, ou de voir une belle photo des montanges du Djurdjura, ou que la brise le matin a dans sa senteur une odeur de terre chaude, pourque mon coeur sent cette peine, cette douleur de l'absence. Est cette douleur alors, une charite, qui rend moins penible la blessure que doit encaisser le coeur qui aime, et qui se voit loin des etres chers? Je me rappelle un jour, qu'une personne m'a dit, au sujet du manque d'un peuple, d'une culture, d'amis chers qu'on y connait: "Tu te rends la vie compliquee, pourquoi l'Algerie, pourquoi la Kabylie? C'est loin!" Et oui, ceci est vrai, mais ce que cette personne, bien intentionnee possiblement, ne sait pas est la certitude incontestable et unique quant a ma vie de poete ecrivaine et artiste. Pourquoi l'Algerie? Pourquoi la Kabylie? Et bien, parceque c'est elles qui m'ont donnees leur coeur, et leurs montagnes, le chaman Berbere qui y vit, et ensemble ils ont changee tout pour ma muse, car depuis mon coeur est a eux, et rien ne changera la verite absolue de cet acte de transformation de mon etre, ni la joie supreme que son peuple et son chaman me savent donner, l'energie des inspirations qu'il est de mes poemes et leurs visions qui s'incarnent dans mes livres que je lui dedie, ni la peine brulante de l'absence de la voix des esprits de ses montagnes, le toucher du sable de sa mer Mediterranee. Ma defense? Accepter ce chagrin et le transformer, et continuer le construire un pont de retour, un poeme, un article, un livre, une piece de l'art a la fois, meme si c'est avec des briques faites de pure volonte et courage, qui un jour deviendront un chemin sur lequel je marche a nouveau sur terre solide kabyle, comme le poete perse Rumi (1207 - 1273), qui disait que "Le chemin se fait en marchant." Les arts sont une magnifique defense contre les absurdites de la vie, contre le mal dans toutes ses formes, de qui on parait etre inondee en ce moment trouble de l'histoire de la terre. La brutalite et la violence partout, le silence total de ceux qui pouvaient l'eviter, et qui en fait, en profitent. C'est d'en devenir malade, cette obsession avec la cruaute, la guerre, la destruction. Et pourtant, partout aussi, il y a des personnes, individuel, ou en groupe, qui font ce qu'elles peuvent, avec toute leur force et conviction, de maintenir l'espoir, le courage, qui luttent contre l'indifference, face a la pauvrete croissante dans les grandes villes, et contre la catastrophe ecologique que souffre la terre, parceque la machine industrielle est devenue un monstre insatiable; des personnes qui se battent pour aider les jeunes qui souffrent de la depression, qui se suicident, parcequ'ils voient toutes les horreurs immenses qui se defilent devant leurs yeux jour apres jour, de guerres inhumaines, d'attitudes racistes, de haine, d'intolerance. Il y a des jours ou comme mere c'est dur de trouver les mots pour encourager a mon fils et ses amis. Je leur dis que ma defense, c'est de celebrer, faire honneur a une culture qui m'a donnee ma voix de poete et ecrivaine, qui m'inspire pour son coeur courageux, accueillant, pour la sagesse de sa mythologie Amazighe, pour son esprit resistant historique, pour la profondeur de ses chansons, et la beaute de sa nature, qui m'a appelee vers ses rives, il y a presque 10 ans. Cet article et son poeme, est dans la serie que j'appelle "Les Ailes d'Aphrodite", pour le fait que c'est elle, la Kabylie, qui me permet etendre les ailes de poete, qui me permet d'etre introduite, apres toute une vie d'isolation culturelle et sociale, a ma voix, mon esprit, mon ame. Elle est l'amour dans mon coeur, la reflection, le miroir de la joie profonde de pouvoir vivre reveillee, libre, unie au destin de m'exprimer les inspirations litteraires - artistiques si longuement me niees. Devoir en ce moment tolerer cette peine de l'absence, ne fait que rendre plus clair, comme une epee forgee dans le feu, la force et l'importance de la flamme kabyle qui vit si completement dans mon coeur d'etre humain unie a ma muse, finalement, comme mon poeme presentera. Il y a un artiste francais qui pratiquait l'art japonais du pliage de papier, dit origami, Eric Joicel (1956 - 2010). Ses sculptures, fait avec juste du papier et de l'eau comme colle, sont tres emouvantes, des sculptures petites de musiciens, de magiciens, dans une evocation ou emane un sens profond de vision poetique, nostalgique quant a la condition humaine. J'ai trouvee une image de lui dans son atelier modeste, entouree de ses sculptures joyeuses, tendres, et resistantes aussi, pleines de cet espoir que sait donner l'art et ses convictions. Je dedie mon poeme "Le retard Imprevu: Une Mecanique Charitable", a ma Kabylie, et au chaman genereux Berbere de mes inspirations creatives: mon collegue kabyle, le photographe Nacer Amari de Tassi Photographie. Je le dedie aussi a ces chers amis kabyles, qui toujours m'encouragent avec leur appreciation de mes efforts litteraires: Lemnouer Khaled et Rac Adrar du groupe des randonneurs CRAK en Kabylie, et avec beaucoup de sympathie aussi, a Mounir Amari a Aokas, le cousin du photographe. Merci pour votre encouragement qui me va toujours droit au coeur:   


Le Retard Imprevu: Une Mecanique Charitable 


C'est un voleur invisible, qui entre sans bruit, et avec une bizarre nonchalance, apres qu'il s'est apprivoise de l'espoir et ses aimables convives, nous laisse avec la blessure qui s'ouvre, de se savoir loin des coeurs des etres chers, qui nous invitent a la fete de la joie de vivre. 

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Comment se defendre contre ce voyou, ce bricoleur qui avec un sourire sadique nous enleve le tresor le plus cher de notre coeur, le lien qui nous unit a ces personnes qui nous aiment? Il s'amuse de construire des murs durs faits de frontieres, faits de dogmes et interdictions. 

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Au lieu de la joie abondante, voila que le violon triste et ses melodies se met sur scene, et au lieu d'une chanson qui celebre la tendresse, sa melodie de l'amour se remplace avec les gestes de mimes impuissants. Le temps qui avant coulait libre, comme une riviere jeune et fiere, se perd dans des heures circulaires, lentes.

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Le jour, j'embrasse ce voleur et ses demandes, en attendant patiemment qu'ils se retire quand arrive la nuit, pour chercher d'autres victimes. J'e m'endors dans l'accueil de la lune et son monde magique des reves, ou je retrouve les bras et la chaleur des coeurs qui me bercent, me font oublier la peine de les savoir partis encore quand arrive le mystere d'un autre jour sans connaitre autre qu'en memoire leur presence et ses bonheurs. 


Trudi Ralston   

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