Quand j'etais enfant dans un petit village flamand, dans les annees cinquantes, la memoire de la segonde guerre mondiale n'etait jamais pas tres loin des conversations de mes grandparents, de mes parents, de mes oncles et tantes. Tout le monde avait perdu des membres de leurs familles, ou comme soldats, ou comme victime de violence comme civiles, ou comme prisonniers dans un des camps de concentration. Ma grandmere avait perdu son mari, et avait connu la pauvrete essayant de maintenir ses quatre enfants, les deux freres aines de ma mere avaient passes plusieurs annees comme adolescents dans les camps pour prisonniers de guerre en Russie, un cousin de ma grandmere maternelle avait peri a Auschwitz, une amie de mes parents avait ete violee par un soldat allemand, un de mes oncles n'avait pas reussi a sauver son meilleur ami de deportation par les nazis, mon pere se rapellait des jeunes au champs flamands, poursuivis par des soldats allemands, frappes et mis dans des trains pour aller travailler comme esclaves et mourir affames et brutalises dans les fabriques d'armes du Reich. J'etais une enfant serieuse, et silencieuse, et on me m'apercevait rarement, ecoutant en cachette les histoires horrifiantes de cette guerre inhumaine. Le mot guerre etait comme l'incarnation d'un monstre dont je ne connaissais pas ni comprenais tres bien le visage ou les raisons.
Il y a quelques jours, le 25 septembre, Djamal Merabti et Mostafaoui Brahim, du groupe " Les Randonneurs des Babors Bejaia ", ont partage quelques photos et quelques observations autour de villages abandonnes pendant la Decennie Noire, la guerre civile algerienne de 1999 - 2001, pendant laquelle les villages montagnieres dans le nord de l'Algerie ont ete victime d'une violence horrible, commencant avec le massacre de Thalit, et apres les massacres de Rais et Bentalha qui surtout avaient chocque le monde pour l'intensite de la brutalite contre la population civile. Il y a une tendence de vouloir oublier, de nier le passe quand celui est trop cruel ou incomprehensible. Je n'avais aucune idee de la souffrance de la population civile en Algerie pendant la decennie noire de la Guerre Civile. Pour moi, la memoire a un niveau personnel, de la cruaute humaine s'avait arrete avec les conversations sur la Segonde Guerre Mondiale de la part des membres de ma famille. Cela reste dur a avaler que telle cruaute se passait si recemment, et de realiser que plusieurs de mes ami(e)s en Algerie etaient nes ou ont grandis pendant cette guerre civile, et que leurs parents avaient soufferts aussi la Guerre de l'Independance, de laquelle j'ignorais aussi pour longtemps l'horreur des atrocites commis par le gouvernement colonial francais, qui seulement tres recemment est pret a admettre le genocide systematique du peuple algerien sous leur gouvernance cruelle. Il y a aussi la tendence de vouloir passer du passe au futur, et de devenir impatient avec le traumatisme immense que laissent les cicatrices de guerre. Dans les annees 1980, ma petite soeur, qui est morte jeune, avait un copain allemand, et la relation avait l'air d'etre serieuse. Mon pere etait tres nerveux, il n'etait pas du tout sur que l'idee d'un mariage entre une de ses filles et un jeun homme allemand etait une idee avec laquelle il pouvait vivre, et cela 40 ans apres la fin de la Segonde Guerre Mondiale. J'observe parfois que le monde est impatient quant a la nostalgie de ses heros de la Guerre de l'Independance qu'a l'Algerie, et l'amertume penible autour de la Decennie Noire. Mais les deux guerres n'ont a peine 30 ans de difference entre eux, ce serait comme si en Belgique on aurait eu une guerre civile horrifiante dans les annees 1970, apres avoir souffert les allemands pendant la Segonde Guerre Mondiale, cela est beaucoup, beaucoup de traumatisme! Le peuple algerien a subi et souffert enormement, et je crois ce qu'il faut est du respect et de la patience. Le passe ne peut pas ni se guerir ni se comprendre si on ne laisse pas les victimes parler de leur souffrances. Biensur, il faut se diriger dans la direction du futur, et aucun journaliste et ecrivain ne fait un plus grand effort envers ce but important que l'infatigable Kamel Daoud, de qui j'admire son courage et energie enormement.
En meme temps, je comprends aussi tres bien la melancholie et le regret de mes ami(e)s en Kabylie, qui essaient de comprendre, de partager, d'integrer, de digirer les dimensions difficiles de deux geurres si desastreuses et tragiques, qui ont laisse le pays dans un dilemme politiquement et culturellement pour lequel les reponses ne sont ni evidentes ni claires. Il y a une blessure dans l'ame algerienne qui prendra beaucoup d'annees de guerir, et qui a besoin que le monde l'ecoute, l'accepte, dans un esprit de respect, interet culturel, tolerance spirituel, et camaraderie, pour le plus grand pays en Afrique qui impressionne par la richesse de son histoire et le courage de son peuple, et qui a mon coeur depuis mon enfance. Je pense aux photos de maisons et villages kabyles abandonnes partagees par Djamil Diboune, et la belle peinture que le photographe de la nature a fait d'une de ces maisons, et qui est maintenant la couverture d'une collection de poemes que j'ai dedique a son art, " La Complicite du Corbeau ". Je pense aux articles partages par mes ami(e)s a Aokas Bejaia Tourisme, et les ecrits et aphorismes sur le sujet de l'histoire, la philosophie et la culture en Algerie de Lemnouer Khaled, les photos de maisons et villages abandonnes patagees par Chamy Tout Court et par Katia Djabri du groupe " Mer, Montagne, Nature". Je pense aux belles photos de ces maisons et villages partagees par Zidani Azzedine du groupe " Les Marcheurs", et je comprend que la blessure de la Guerre de l'Independence et de la decennie noire de la Guerre Civile ont laissees des cicatrices cruelles et profondes dans l'esprit fier et fort du peuple de l'Algerie, ce qui ajoute une mesure encore plus grande a mon amour pour lui et a l'espoir pour un futur valable et heureux du pays.
Trudi Ralston
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