La nature meme ici ce matin, parait sous l'influence d'un silence maladroit, penible. Les dernieres feuilles grandes des erables tombent, avec l'aide d'une tempete de vent hier, qui les a vu faire une meditation Sufi, dansant en grandes cercles, evoquant ma nostalgie pour la poesie de Rumi (1207 - 1273), le poete perse qui etait convaincu que c'est l'amour qu'il faut mettre au centre de la vie humaine: "Il faut briser le coeur, jusqu'a ce qu'il s'ouvre." Quel contraste avec le monde aujourd'hui, qui justifie le genocide au nom de l'arrogance, de la superiorite ethnique, d'obessions immondes avec le pouvoir et la violence. C'est l'ecrivain russe courageux Aleksandr Solzhenitsyn (1918 - 2008) qui a dit : "La violence ne se justifie qu'a travers le mensonge, et le mensonge ne se justifie qu'a travers la violence." Le monde se retrocede, cede au mal, et si le mal gagne, ce sera parce que l'humanite, ou ce qui en reste, accepte de voir a autrui ne pas comme a une personne, mais a un symbole d'un systeme, d'une ideologie a hair, a detruire. La Kabylie me manque, pouvoir y retourner me manque, reste incertain. Mon coeur de poete, d'artiste, a recu la liberation de son etre sur ses rives, dans l'accueil de son coeur, de son esprit ouvert, heritiers de milliers d'annees de sagesse, de courage, de resistance. Et le monde en ce moment, eloigne, ferme, le coeur, le courage, et chasse l'espoir avec le bruit de ses machines de guerre, de destruction horrifiante. Ce poeme exprime ma reconnaissance pour la culture Berbere de l'Afrique du Nord, pour la Kabylie, pour mon collegue, le photographe Nacer Amari, pour l'esprit universel et uniquement kabyle de son art et pour son talent pour une esthetique narrative inclusive, pour la terre Berbere, qui m'a donnee ma voix de poete, son identite, sa fierte, son espoir. Ce poeme exprime aussi, comme un cri, une urgence, de ne pas se permettre de fermer le coeur, de ne pas devenir aveugle, en rage, de continuer d'avoir le courage de voir a nos voisins, a nos amis et amies, a nos familles, loin et proche, qui vivent derriere les limitations de frontieres leurs imposees, de violence, de guerre, de se voir ne pas comme des groupes, a aimer ou hair, mais comme des etres humains, descendants de la meme terre. La lachete des dirigeants de notre monde envers les milliers d'enfants, hommes et femmes, victimes du genocide envers le peuple palestinien, est au - dela d'ecoeurant. Petit a petit, le monstre gris de cette guerre avance, devorant toute decence, et si le Mal gagne, est - ce qu'on aura encore le droit de dire, qu'on est humain, ou est - ce qu'on sera apres autre chose?
Et si le Mal Gagne
Il y a un silence mortel, qui avance, qui fait fremir les oiseaux dans la foret, qui fait que tombent les feuilles d'automne avec un bruit de plomb, de detresse. Mes pas resonnent vide sur l'herbe froide, ne laissent pas d'ombre ou trace, sur la lumiere opaque qui cache le soleil qui se gene, qui efface ses larmes chaudes.
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Sur l'ecran le soir je vois les images de destruction, qui couvrent en nuages gris immenses, l'avance de la mort des innocents, qui ne savent plus comment echapper les monstres qui les devorent. Les mots de l'ecran reverberent, des cacaphonies absurdes, comme dans un cauchemar sans entree, ni sortie faisables.
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Au fond du bruit, j'entends comme venir de loin, le rire malsain, qui s'amuse des souffrances, qui se nourrit de la violence immonde, qui se croit sur de la victoire, et dessine deja les nouvelles frontieres, un neant ou font la parade les spectres qui decident qui a le droit a la vie, et qui meurt.
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Et le theatre de l'absurde continue, et le choeur au fond repete, somnambule, que tout est bien, que l'ordre avant tout, peint des grimaces malsaines, de voir qu'ils ont reussi, aussi longtemps qu'on digere sans question le mensonge qu'il ne faut jamais se permettre de voir a chaque peuple comme digne, comme egal, il faut les mettre en groupes, a detester, a detruire, pour avoir l'audace de se battre, pour le droit inalterable a leur propre destin, a leur propre terrre.
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Le silence de la foret me suit vers la maison, ou mes pas absorbent la melancholie, la tristesse, de savoir ma Kabylie si loin, comme la memoire d'un reve, que je me suis imaginee, et qui recede, ou je vois mon coeur et mon esprit disparaitre, dans les couleurs grises et les larmes de la pluie incessante.
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Peut - etre a moi aussi, la Kabylie me voit ne plus poete qui l'aime, mais simplement citoyenne d'un pays qu'elle en ce moment deteste ses dirigerants qui ne defendent pas les innocents de cette guerre immonde. Je me sens disparaitre, petit a petit, comme une aquarelle laissee dehors, effacee, sans consequence.
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Petit a petit, le Gris de la violence avance, une cacaphonie venant de loin, de l'abime du neant, devorant tout dans ses griffes et dents sanglantes. "Il faut briser le coeur, jusqu'a ce qu'il s'ouvre." Ma voix de poete etait bien cassee, avant le toucher sur de Chiron, le guerisseur Berbere de mes blessures profondes.
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Qu'est - ce qu'il en resterait de mon coeur, de mes poemes, qui celebrent sa sagesse, sans ses mains sures qui les hebergent? Ils tomberaient en trance dervish, comme les feuilles des erables a mes pieds, laissant un dernier son d'espoir, pour s'unir a la brise, a nouveau inaudibles, invisibles, pour rever de la terre Berbere aussi longtemps que possible.
Trudi Ralston
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