Amin Zaoui est un ecrivain qui parle sans peur et sans hesitation des angoisses et doutes les plus profondes de la condition humaine. Ce n'est ainsi pas surprenant que l'auteur bi -lingue algerien, ne en 1956 a Bab el Assa dans la province de Tlemcen et qui a un doctorat en litterature comparative de l'Universite a Oran, a ses livres traduits dans des douzaines de languages.
J'ai lu de lui 3 livres recemment, trois livres qui couvrent 20 ans, avec l'idee de trouver un fil dans ses livres qui unie ou explique sa facon de rompre les taboos avec confiance et but.
" La Soumission ", publie en 1998, est un livre qui bouleverse, pour l'intimite et l'intensite des conflits de ses personnages. Dix ans plus tard, en 2008, Amin Zaoui publie " Festin de Mensonges". Ce livre aussi, montre la perspective d'un enfant, un jeune garcon. " L'enfant de l'Oeuf " publie en 2017, montre la perspective d'un homme Mouloud, qui a au moins 60 ans, et la perspective de son chien, Harys. A travers cette periode de 20 ans, Amin Zaoui a addoucit l'intensite de ses recits, avec un sens de l'humour qui a peine deguise les sujets serieux des livres. Sans reveler le contenu de ces trois livres superbement ecrits, le sujet hanteux au point de delire des 3 livres est l'alienation et le desir. Le desir devient une arme pour combattre le monstre de cette alienation, un monstre qui termine par devorer toute chance d'espoir, de resolution. J'ai grandi dans l'ombre de la segonde guerre mondiale, des entrailles de laquelle est ne l'existencialisme urbain, et l'expressionisme. L'ecrivain allemand Heinrich Boll ( 1917 - 1985 ), qui a recu le Prix Nobel pour la litterature en 1972, de qui j'ai lu " Le Clown " ( 1963 ), et " Journal Irlandais " ( 1957 ) etait un ecrivain qui savait decrire cette angoisse existencielle avec un style a la fois lyrique et spartane. Lire " Le Clown " a l'age de 16 ans etait une experience inoubliable, qui a cemente solidement mon interet dans l'existencialisme comme genre et philosophie. Les livres de Amin Zaoui sont satures d'angoisse existencielle, un taboo en soi pour ses personnages, tourmentes par des codes morales, sociales et religieuses asphixiants et contradictoires. Ce qui m'a frappe en lisant les trois livres, c'est que je me sentais tres proche a les souffrances et conflits des caracteres. Je suis nee en Flandes, eduquee dans des ecoles catholiques, dans une famille d'artistes et intellectuels, neaumoins serieuse envers ses croyances religieuses, malgre un pourcentage considerable de doute et cynisme envers leurs doctrines. A l'universite au Texas, pendant mes etudes de maitrise en litterature espagnole et latino- americaine, j'ai fait la connaissance de mes amis musulmans de Bangladesh, de l'Egypte et du Maroc, de mes amis hindus de l'Inde, buddhistes du Japon, athees de France, chretiens protestants de Texas, ce qui a garanti une attitude ouverte pour le reste de ma vie. Les livres de Amin Zaoui touchent cette attitude universelle qui m'a toujours fascine, une attitude qui s'interesse profondement au mystere de la vie humaine, pour cette obsession de vouloir mettre tout dans des codes morales et religieuses qui divident et controlent le comportement des individus a un point etouffant, etranglant, et dans le cas du recit et ses personnages de " La Soumission ", ce controle conduit a une mort tragique d'une jeune fille, encore enfant. La mort d'une jeune personne comme consequence de codes leurs imposees par des adultes, est un theme qui est universel. Quand j'avais 13 ans, le frere d'une copine a moi au lycee, dont son pere etait un gynecologue respecte en ville, s'est suicide quand son pere l' avait humilie et terrifie apres son echec d'un examen. Le garcon, de qui je rapellerai toujours son nom, avait 16 ans. Il s'est pendu dans sa chambre. Je me rappelle les yeux vides de sa soeur, le vide de ses yeux etait horrible apres la mort de son frere. Les horreurs commis au nom de decence et exigences sociales ne se limitent pas par la religion ou moralite d'une culture ou societe specifique, les horreurs commis varient, mais leurs resultats sont egalement terrifiants quand pousses vers des extremes. J'ai un ami belge, deja vieux a presque 80 ans, qui reste traumatise par les abus sexuels soufferts comme orphelin aux mains des pretres qui etaitent supposes de le proteger. Aucune religion protege de la possibilite d'abus, aucune code de moralite sauvegarde les erreurs et hypocrisies. La defense contre ces abus, et la solitude que ces abus creent, est le desir, dans le cas des personnages des livres de Amin Zaoui. C'est une reponse tres humaine, qui malheureusement a son tour, cree des victimes, surtout parmi les femmes et les enfants. Cette reponse du desir a une tradition respectable dans la litterature, je pense immediatement aux romans de l'ecrivain russe - americain, Vladimir Nabokov ( 1899 - 1977 ), avec le livre " Lolita " de 1955. " Lolita " est l'histoire de l'obsession et passion d'un homme adulte pour une fille de 12 ans, un livre qui a donne a Vladimir Nabokov a la fois fame et notoriete. Donc, pour moi, Amin Zaoui est un auteur profondement moderne, qui utilise le taboo pour liberer. Je sais qu'il a a du quitter l'Algerie pendant la Guerre Civile des annees quatre vingt - dix, et que ses livres etaitent alors interdits, mais en 1999, l'auteur est retourne en Algerie, ce qui parle de son courage et dedication a son art. Le style des livres de Amin Zaoui est tres agreable, a une fluidite et aisance, malgre le sujet serieux des recits, et ce style sensuel et concret addoucit le poids qui opprime ses caracteres : le vin, le parfum des femmes, le reve,.. sont des elements qui permettent le lecteur de se detendre un peu pendant le ritme intense de la narrative. Ce talent me rappelle les livres baroques de l'ecrivain colombien Gabriel Garcia Marquez ( 1927 - 2014), comme dans son oeuvre la plus connue, " Cien Anos de Soledad ", " Cent Ans de Solitude ", pour lequel l'auteur a recu le Prix Nobel en 1982.
Alienation et desir sont des cris universels dans les dilemmes de la condition humaine. Que cette alienation s'exprime si librement dans un auteur algerien, a un moment ou le pouvoir du pays prend un tour pour une imposition plus stricte de la religion musulmane, donne l'impression que ce sont uniquement les pays ou la religion musulane domine qui ont des conflits choquants dans leurs societes. Amin Zaoui brise ces illusions, et j'en suis tres contente. La meilleure facon d'essayer de detruire les divisions de " nous qui sommes civilises et ne seraient jamais capables de tels outrages, comme eux, de ces pays la- bas avec leurs moeurs et religions feudales ", est d'avoir des ecrivains comme Amin Zaoui qui reduisent ces hypocrisies a la poussiere. La seule facon d'initier une conversation sincere est de se mettre d'accord d'abord qu'on a tous des monstres a detruire dans la moralite sociale et religieuse de nos societes. L'abus d'un enfant chretien n'est pas plus repectable que l'abus d'un enfant musulman, ni est la peine de la solitude sociale que l'alienation impose dans nos villes parceque ca se passe a Los Angeles au lieu d' Alger.
Amin Zaoui est un grand ecrivain, qui brise les taboos, parcequ'il sait que c'est la meilleure arme contre les maux sociales, ceux en Algerie, surement, mais pas moins que ceux en Europe, l'Amerique et le reste du monde.
L'information sur la vie de Amin Zaoui , courtoisie de Wikipedia, ainsi que l'information biographique sur Heinrich Boll , Gabriel Garcia Marquez et Vladimir Nabokov.
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