C'est une sensation qui s'impose encore de temps en temps, une memoire qui laisse son gout de metal rouillee, et qui reveille un frisson de la solitude du passe, une ombre collante, qui peint le jour avec ses grimaces brisees, sa poussiere faites des cendres de peines cicatrisees. La pluie s'avait arretee, et des beaux nuages blancs apparaissaient comme des voeux soudains faits par le ciel bleu frais. Les arbres au bord de la foret, au fond du jardin, etaient decorees encore avec des gouttes d'eau brillantes que la pluie les avait laissee, et une brise chaude me touchait, et me decorait a son tour, avec le souvenir visuel des montagnes en Kabylie. Du coup, la sensation desagreable de la memoire de solitude, me quittait, comme un manteau qu'on enleve, quand le froid cede a la chaleur du soleil et sa lumiere. La Kabylie etait ma fee qui chassait decidemment ce qui restait du gout et ses memoires de la solitude avant que la culture berbere m'avait sauvee mon ame et coeur de poete.
On dit que ceux qui ont souffert des blessures, des insultes, des solitudes, sont les mieux equippes pour guerir les blessures d'autrui, parceque ils ont le coeur le plus genereux, au contenu le plus profond de sagesse, de charite, et la Kabylie en a encaissee des blessures a son esprit, a son coeur, a travers des milliers d'annees d'invasions, de violences aux mains de colons arrogants et sadiques, qui a travers les siecles ont laissees les traces de leurs spectres. Mais le coeur, l'esprit du peuple Kabyle est intact, brule avec un feu clair, fier, resistant, et est pour moi le symbole de l'espoir, de la dignite, de la chaleur accueuillante qui guerit, qui inspire, qui est la source de joie pour ma muse, la melodie de mes poemes, de mes livres, de leur explorations, de leur courage. Je m'imagine le coeur et l'esprit Kabyle tel un oiseau magique rouge, qui a reussi a m'aider eviter et evader les pieges d'une piece de theatre, un conte qui me trouvait perdu dans une mise en scene de la part d'un regisseur qui s'etait evoque de texte, et que la Kabylie et ses troubadours, ses artistes, m'ont aidee a m'en liberer. Depuis, mon esprit et coeur, si longuement seuls, tristes, chantent avec beaucoup de joie, beaucoup d'energie. Je m'imagineais voir l'oiseau rouge marchant dans l'herbe du jardin, comme un paon confiant, a la queue grand ouvert, ses plumes d'un rouge brillant eclatant, comme d'un bijou rubis, et sa couleur carmine. Sans cet oiseau rouge berbere, ce symbole vibrant, qui vit dans mon coeur de poete, qui avait fait disparaitre le gout amer de la solitude, me laissee par trop d'annees ici aux Etats Unis, un pays trop distrait pour me voir les reves, trop petit pour entendre ma voix de poete, j'aurais restee poete sans voix, invisible dans le bruit d'un pays a l'ame perdue. La Kabylie et sa culture, sa nature, ses artistes, sa grande famille berbere, m'ont vu le coeur, et m'ont invitee a vivre libre, a connaitre le bonheur de l'appartenence, de la dignite et de la fierte d'etre une membre de sa famille, de me sentir chez moi dans l'etreinte de son sein chaud, moi, qui avait perdue mon pays, ma famille de sang, mon identite, ma voix.
Depuis, l'oiseau rouge magique berbere, s'occupe de mes blessures, les soigne, les guerit chaque fois plus, dans l'accueil et la grace que trouvent mes poemes, sur terre eternelle Kabyle en Algerie. Elle m'a sauvee la vie d'un ocean de tristesses et solitudes, d'un silence asphixiant, mortel, et les seuls moments que l'ombre de ce passe et ses cauchemars me revient, est quand je me rappelle comment ce fut, vivre sans elle pour tenir mes poemes dans ses grands bras resistants. L'oiseau magique rouge symbolise le sourire, le bonheur, la liberte, pour ecrire mes ecrits, mes poemes, avec et pour ma famille berbere.
J'ai perdue en 2008, a mes parents, qui les dernieres dix annees de leur mariage malheureux ne vivaient plus ensemble, mon pere vivait en Belgique, et y est mort, a Oostende, suite de complications de la demence, a l'age de 79 ans. Ma mere, est morte au Texas, a Fort Worth, suite de la cirrhose du foie, a l'age de 74 ans quelques mois apres la mort de mon pere. En 2005, j'ai perdue une de mes deux soeurs, a Georgia, dans le Sud des Etats Unis, suite d'un cancer virulent, a l'age de 44 ans, et mon autre soeur suite d'un suicide, aussi a Georgia, en 1998, a l'age de 35 ans. Mon unique frere est mort l'annee passee, suite d'une crise cardiaque, a Fort Worth, au Texas, a l'age de 61 ans. Les seules personnes dans ma famille a qui j'etais proche fut mon pere, et ma soeur qui avait 35 ans. Mon pere, vers la fin de sa vie, les cinq denieres annees, ne savait plus qui j'etais, et ma petite soeur souffrait du chaos de la depression bi - polaire. La seule famille que j'ai ici dans ce pays de 333 millions d'americains sont mon mari et mon fils, et une niece et un neveu, les enfants de mon frere, au Texas, et son fils, je n'ai pas vu en 25 ans, et sa fille qui a 29 ans, je ne connais que de photos. En Belgique, il y ma tante a Oostende, la soeur la plus jeune de mon pere, et deux cousins et deux cousines avec qui j'ai su maintenir le contact a travers les annees, mais qui je n'ai plus vue depuis mon adolescence. Ma famille de coeur est ma famille berbere en Algerie. Elle m'a sauvee la vie de poete, elle me la sauve encore chaque jour a nouveau. Un texte, trouvee par belle coincidence, cette semaine suite d'une recherche pour un futur article et poeme, exprime le miracle me fait pour mon coeur de poete flamande - americaine et ses profondes blessures, par le coeur eternel, chaud et fier, genereux, de ma Kabylie: " Tu verses ton coeur dans le mien, et depuis, mes fissures se guerissent."
Trudi Ralston
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