Tuesday, July 16, 2024

Les Ailes de l'Araignee: dans la serie "L'Hurlement des Loups du Midi" dediee a Nacer Amari

             Les etes ici dans le Pacifique Nord - Ouest des Etats Unis, deviennent chaque annee plus seches et chaudes, avec des temperatures au mois de juillet et aout, qui vacillent entre 30 et 40 degres Celsius. Les matins alors, sont les heures quand la fraicheur est encore presente, et que le soleil reste moitie invisible, derriere l'ombre genereuse des grands sapins a la frontiere du jardin ou commence la foret a l'autre cote de la cloture. Tres tot, a partir de 4:30 quand les oiseaux commencent leurs chants agreables, tel un orchestre qui se prepare pour le commencement du programme musical, jusqu'a environ l'heure du midi, il y a une ambiance de douces senteurs que partagent les fleurs avec les abeilles et papillons, et avec mon chat Zora et moi. Il y a une table et des chaises a l'ombre, au fond du jardin, sous le grand cerisier, et y passer des pauses apres le petit dejeuner, est une experience qui remplit l'esprit tel l'eau douce son vaisseau. Les chaises restent pour la plupart vides, et je m'y imagine souvent a mes soeurs et mon frere, mes parents, surtout mon pere, tous deja disparus depuis beaucoup d'annees. La joie d'une grande famille, de tantes, oncles, cousins, cousines, de freres et soeurs, de parents, de grandparents, de nieces et neveux, n'existe plus que dans ma memoire, et les chaises vides sont occupees par leurs fantomes, qui timidement se retirent devant moi, et mon mari, mon fils et ses amis, quand on y visite ensemble ces jours d'ete chauds. Le jeu des ecureuils et des oiseaux, petits et grands, en face de la table et les chaises trop souvent vides, sont une distraction amusante, sympathique, pour mon chat et moi. Ils sont d'une sorte, eux aussi, de la famille, avec chaque ecureuil et oiseau son caractere, certains timides, d'autres agressifs, menacants a leurs compagnes. D'autres chats des voisins autour, visitent aussi le jardin, et des saragues, des ratons - laveurs, des coyotes, de temps en temps un hibou solemne, ou un aigle imposant. Ces animaux me rappellent que la condition humaine quant a la solitude et ses enigmes, n'est pas un absolu. Il y a la realite concrete, souvent proche du monde des animaux, qui dans mon cas, me donne une mesure de consolation, de perspective, de paix aussi, de me savoir etre une partie petite, d'une variete immense d'especes de faune et flore, qui nous entourent, et qui partagent ce destin precaire et difficile a naviguer de la vie sur cette plaine terrestre. J'observe en silence aux ecureuils, qui tels les etres humains, se disputent, se communiquent, s'aiment, boivent de l'eau, mangent, dorment, se reposent pour des siestes, hauts dans les branches des arbres, qui comme des etres humains, me regardent certains jours avec confiance et curiosite, et dans d'autres moments, avec indifference, ou impatience. Certains des ecureuils, ont mauvais caractere, et s'amusent d'harceler leurs compagnes, certains entre eux manifestent une confiance evidente, ou sont tres timides. C'est tout un petit theatre d'observers leurs routines, leurs reactions. Dans des moments ou le silence et la paix du jardin s'effacent pour ceder a une melancholie de manque de famille, de terre, de langue materne, de racines culturelles, aller voir les ecureuils et oiseaux au jardin, avec la gentille compagne Zora, adoucit ces moments, et leurs tourmentes qui telle une blessure physique prend son temps de finir avec sa douleur, inaudible, qui pourtant hurle tel un cri de rage que je supprime, qui se noye dans les larmes reprimees qui restent au fond des espaces invisibles ou reside mon coeur. Les animaux aussi, connaissent le monde ambigu des rencontres, des demandes sociales, de l'inegalite entre les membres d'une communaute, comme certaines personnes cherchent la dominance, le pouvoir sur les autres, font souffrir, tandis que d'autres sont genereux, charitables. Un grand mystere dans la vie terrestre, est la souffrance, l'abus du pouvoir, et toutes ses expressions, de personne a personne, de famille a famille, de communaute a communaute, a travers des systemes de manipulation physique, psychologique, politique, economique, et toutes les miseres que ceci sait generer, a un point ou certaines personnes se trouvent dans une position de controler la vie de millions de personnes, comme on peut constater tous les jours: des guerres, des famines, des destructions et pertes de vie catastrophiques, au nom des systemes qui valorisent leur pouvoir, leur argent et qui voient la vie des autres ne comme un moyen d'achever leurs buts sinistres. Ce matin, j'ai pensee a cette idee de la souffrance individuelle et de communautes, de peuples entiers, depuis la nuit des temps: le mal n'est pas une idee abstraite, mais se promene en forme humaine, en chair et os, dans les rues, les villages, les villes, et se nourrit des reves, des espoirs, des corps, des coeurs, de l'innocence de milliers et milliers de personnes chaque jour, et se cache derriere la terreur, et ses ideologies et justifications de superiorite et de justice tordues, pour justifier la misere et la souffrance. J'ai pensee a une araignee, qui sait atrapper des animaux qui n'ont pas des ailes, dans sa toile, sait enlever le pouvoir du vol, elle, qui n'a pas des ailes, mais pleines de pattes, pour pratiquer et perfectionner la technique efficace de sa toile de qui sa soie est collante, et plus que l'insecte victime se bat pour se liberer, plus que la matiere collante de la toile s'attache au pauvre animal, que ce soit un papillon de nuit, une abeille, une mouche, c'est l'araignee, observant la lutte inutile de sa proie, qui gagnera. La seule chose que doit faire l'araignee maligne, une fois que l'insecte se rend compte qu'elle est prisonniere, est attendre. Il y a une patience qui est nee de la sagesse, de la gentillesse, et il existe aussi la patience qui aime epuiser la resistance et le courage de ses victimes. Cette patience est sadique, et s'amuse entretemps, que ce soit pour enlever l'espoir d'une seconde chance a une vie decente, a la liberte, a la dignite, de la part d'une personne qui essaie de se liberer d'une relation etouffante ou abusive, de la part de prisonniers victimes d'un systeme injuste, de personnes victimes d'atrocites de guerre, de lois d'immigrations implacables. Le symbole de l'araignee habile qui profite de la proie ignorante, qui avant volait libre dans le ciel, et se trouve soudainemenr immobilisee dans la toile de l'arachnide. Une fois dans la toile collante, la brillance des ailes superbes en technique de l'insecte, ne servent plus. C'est l'araignee qui aura les ailes, le pouvoir, le controle. La seule facon de se combattre contre ce malheur, est de rester loin des araignees, si on est sur son menu favori, de toujours se rappeler de ne pas prendre le risque de voler trop proche ou habite l'araignee. Car le remede est presque toujours fatal, mieux vaut eviter sa possibilite tout court. 

             C'est fascinant d'y penser, a l'araignee et ses trucs efficaces, il y a des bibliotheques entieres, remplies de la litterature de tous les pays, dans le passe et le present, qui traitent du sujet de la misere humaine, de son impuissance, de sa tragedie, enore et encore, d'heros et heroines dans les luttes de la vie quotidienne ou dans des circonstances exceptionnelles, qui souffrent et se trouvent vaincus par les manoeuvres malfaisantes de personnes adeptes a la manipulation prolongee, systematique, qui espere que sa victime ou ses victimes vont se rendre vaincues, a haute voix, ou en silence, vont abandonner l'espoir de s'echapper des griffes parfois bien impeccables, polies, de ses tourmenteurs. Les livres des ecrivains russes Fyodr Dostoyevsky (1821 - 1881), Boris Pasternak (1890 - 1960), Aleksandr Solzhenitsyn (1918 - 2008); les pieces de theatre d'Anton Chekhov (1860 - 1904); les romans de Leo Tolstoy (1828 - 1910) les poemes, pieces de theatre et romans du poete russe Aleksandr Pushkin (1799 - 1837), les romans et pieces de theatre de Nikolai Gogol (1809 - 1852), les romans de Mikhail Sholokhov ( 1905 - 1984), qui allait recevoir en 1965 le Prix Noble pour la litterature, comme son collegue Aleksandre Solzhenitsyn, qui l'a recu en 1970, se trouvaient en abondance dans la bibliotheque du bureau de mon pere, et entre l'age de 19 et 30 ans, j'allais lire la plupart d'eux. Ce qui m'avait impressionnee, et continue de me hanter jusqu'a aujourd'hui, fut le poids du mystere du destin, soumis a des forces presqu'impossible de vaincre de la part des protagonistes et leurs luttes de ces maitres de la litterature russe. Je crois que j'ai su trouver beaucoup de courage et aussi un certain bizarre sens d'equilibre, face a tants de defis et traume suite de la perte totale de famille entre 1998 et 2008, et encore en 2020 ."Crime et Chatiment", "Les Freres Karamazov", "La Mouette", "Le Docteur Zhivago", "Une Journee dans la vie d'Ivan Denisovich", "Et Tranquillement Coule la Riviere Don", "Guerre et Paix", tous ces livres intenses, profonds, laisseraient un impacte durable sur ma vue existentielle et les controverses ineluctables que la vie m'avais mis et met sur le chemin. L'araignee paraissait y gagner avec une aise malsaine, tants de fois: le mal actuait avec une precision anatomique, pour trouver une satisfaction nauseabonde dans ses triomphes sur les heros et heroines de ces romans, poemes, pieces de theatre russes si memorables et captivants. Chez eux, je me sentais a l'aise, assuree que la vie ne garantise rien, sauf des obstacles a surmonter, des puzzles presqu'impossible a resoudre. Si les russes le savaient tolerer, generation apres generation, guerre apres guerre, apres revolte et revolution, il fallait que je savais faire face a mes defis, mes pertes, ma deracination, mon exile, ma solitude. Pour moi, la Kabylie et son peuple, sa culture, sa nature, fut une revelation. Dans le coeur et esprit resistant de son ame, si poetiquement exprimee dans sa musique, ses danses, son histoire courageux, sa mythologie si proche a la nature, ses artistes et poetes, ses heros anciens et contemporains, je trouve depuis 2017, une source immensement riche et toujours fraiche d'inspiration, d'energie, de camaraderie, d'amitie, de tendresse, de perspective, de guerison affective et sociale, qui a en ce moment engendree deja 12 livres en prose et poesie, et 12 pieces de l'art. Je viens de publier le 12 ieme livre "La Flute et l"Echo", qui est le 6ieme livre sur la photographie et son impact de l'artiste d'Aokas, Nacer Amari de Tassi Photographie, qui continue d'avoir une influence remarquable et unique sur les energies de ma muse. Sa photographie et sa presence sure et narrative, son esprit a la fois universel et uniquement kabyle, est la flute qui me permet comprendre l'echo qui s'y reconnait mon esprit si longuement muet, inaudible, qui me permet reclamer mon identite fracturee, anulee tants d'annees. Quant a la Kabylie, et l'art de mon collegue kabyle Nacer Amari, l'araignee vorace a du se reculer, et mes ailes de poete ont su se liberer, a temps, et avec force et grace tout en un. Cette nouvelle serie, ensemble avec la serie pour le prochain livre, deja a 30 articles et poemes maintenant, "Les Blessures de Chiron", sur les portraits et leur importance du photographe Nacer Amari, suivent cette merveilleuse energie creative que son art inspire pour ce qui sera les 7ieme et 8ieme livres sur mon collegue kabyle et sa vision neo - baroque et ses perspectives reflexives, fraiches, vibrantes qui coulent dans ses sensibilites et son symbolisme arretants vers les rives de ma terre d'origine, les Flandes, de mes racines blessees, qui se guerissent, de mesure exponentielle, sur le rythme et les sons de la voix puissante, eternelle de la Kabylie, qui remplit la source et les chants de mon coeur, ses melodies et poemes, et ma fierte de me savoir finalement libre, fiere, d'ici a Olympia, a travers deux oceans et la Mediterranee, jusqu'au sommets solemnes du Djurdjura. 

Trudi Ralston  

"Et pourtant, tout ce qui nous touche, a toi et moi, nous touche ensemble, tel l'archet du violon, qui tire une voix de deux accords uniques." - le poete autrichien, Rainer - Maria Rilke (1875 - 1926).

Les dates sur les ecrivains, poetes et dramaturges russes dans cet article, courtoisie de Wikipedia.   

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