Tuesday, October 18, 2022

Le Fuchsia au Ralenti - dans la serie "Les Blessures de Chiron"

          Le matin s'annonce en silence ici aujourd'hui, un silence de brumes qui hesitent se rendre a la lumiere chaude du soleil, qui lui attend avec patience que se deshabillent les ombres lentes de la nuit, qui s'envont avec une certaine nonchalance, qui borde a l'indifference. Je pense a ma Kabylie, loin en distance geographique, et si proche affectivement et intellectuellement, a mon coeur de poete. On avait eu un printemps froid et pluvieux cette annee, ou tres peu des fleurs au jardin ont fleuri, et maintenant, on a une automne chaude et seche, et du coup les roses et meme les pois de senteurs font la fete, avec leurs couleurs vives et tendres, et me laissent le plaisir de leurs senteurs joyeuses sur la brise. Les fleurs fuchsia aussi celebrent le soleil et la chaleur estivale en pleine automne, et c'est une d'elles avec ses boutons rouges prets a s'ouvrir pour reveler sa jupe pourpre, fragile et sensuelle, pour laquelle sont connues ses fleurs d'origine de l'Amerique latine et de la Zelande et le Tahiti, qui m'a rempli le coeur d'une nostalgie profonde pour ma famille berbere en Kabylie, et qui m'a inspiree ce poeme au gout melancholique du manque que seul l'amour profond sait evoquer au coeur qui aime, qui attend, qui reve de la reunion, de la rencontre si longuement attendue: 


Le Fuchsia au Ralenti


Il y a ces moments ou on se rend compte, que le temps marche, avance, horloge incontournable, et somnambule, au calcul froid, meticuleux, qui dans son rythme de metronome inflexible, garde en equilibre precaire, la patience, qui risque devenir obeissance aveugli au destin et ses cruelles exigences. 

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Le fuchsia et ses beaux boutons de fleurs rouges, encore endormi, attendent que la lumiere chaude du soleil les eveille, les libere les petales pourpres de ballerine ivre, fiere, qui veut joindre la danse de sa fleur nouvelle, pour celebrer l'ete et ses delires, d'abeilles amants qui la visitent, qui lui boivent son nectar et la traduisent en miel, en partage de joie, de courage. 

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Au ralenti, les boutons s'ouvrent, comme si le temps leur exige qu'ils respirent un peu en arriere, sous le defi de devoir obeir le temps et ses lois draconiques, ou la memoire n'a pas de choix que se soumettre au roi et reine du passe, du futur, qui mesurent les graines pour la saison, que leur laisse la nature. 

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Me voila, poete en exile, qui a le corps ici, et le coeur en Algerie, en Kabylie, ou chantent les melodies de mes reves, me voila tel le bouton rouge du fuchsia qui pleure la blessure de se voir suspendu dans le temps, tremblant dans le froid du nord ici, revant de la chaleur du coeur berbere, ses bras, ses etreintes. 

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Au ralenti, sous l'incertitude d'un monde qui joue cache - cache avec les grimaces des tenebres, qui s'amuse a chasser l'espoir et le sourire de cette terre, j'attends, je reve, j'ecris mes poemes, et la douceur du soleil me touche les mots qui comme les boutons du fuchsia veulent danser libres, sur terre berbere,

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Veulent etre une ballerine poete, qui peut celebrer etre libre du sortilege de tout mal, de se savoir entouree de ma famille de coeur, qui me permet ouvrir mes ailes, poete libre, comme la fleur du fuchsia, qui finalement se voit ouvrir ses petales, son ame durement eprouvee, ne plus prisonniere. 


Trudi Ralston

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