Thursday, March 9, 2023

Une Victoire Audacieuse: "HAKIM" de Nacer Amari et l'Histoire Improbable du Sourire dans le Monde de la Portraiture

           L'impact de la photographie est multi - dimensionnel quant a son influence culturel - historique, une influence qui continue de la part de cette rebelle du monde des arts visuels, qui sait travailler son genie technologique avec les sensibilites des moeurs et obsessions et defis de tous les mouvements que la photographie touche depuis son inception au XIXeme siecle et consequente popularisation aux XXeme et XXIeme siecles. Tandis que le monde de la sculpture, de la peinture devait accepter les limitations du temps et de l'espace quant a la possibilite d'expressions spontanees et fluides, la photographie etait et reste capable de capturer et donner expression a toutes les nuances affectives du corps et du visage humains dans tous ses moments d'agonie, de paix, de joie, de tristesse, d'espoir, de colere, de misere, de douleur, qui visitent l'etre humain et que le photographe et son appareil savent interpreter et partager. Une des emotions et expressions les plus controversielles dans le monde de la portraiture est celle de la presence longuement contestee du sourire. Un portrait en noir et blanc au titre en Tifinagh, du 7 mars 2023 de Nacer Amari de Tassi Photographie, "HAKIM" est une fortuite opportunite de faire une exploration de l'histoire complexe du sourire dans le portrait. Ce portrait montre le protagoniste avec un sourire grand ouvert, un sourire joyeux, vibrant. On va situer d'abord le contexte de ce portrait a base de sa perspective du photographe: "Je voulais te parler de ma derniere photo qui est un portrait type poitrine techniquement parlant et qui met en valeur la partie superieure du corps. Il nous parle d'un homme, fils d'Aokas dont la fonction est Iman (Muezzin). Son nom en Tifinagh se traduit en Hakim, qui veut dire "Le sage", ce qui veut dire que son nom, son caractere et sa personalite s'assemblent. Hakim a un grand sourire qui lui ajoute une dose de beaute et de bonte au visage en mouvement, qui indique la sympathie, l'affection et le plaisir. La photo est prise lors d'une fete de mariage. " De nos jours, la presence du sourire dans une photo en portrait ne cause pas de controversie, mais comme on va decouvrir, ceci ne fut pas le cas pour tres longtemps. Un article de la part du conferencier a l'Ecole des Arts de Cambridge en Angleterre, Nicholas Jeeves, "The Serious and the Smirk ", de 2013 - 2014, qui se traduit comme "Le Serieux et le Sourire", dans la Revue "The Public Domain", met en contraste cette attitude contemporaine avec la longue et tortureuse evolution pour l'acceptation du sourire, et il donne l'example d'un des personnages dans le livre "Nicholas Nickelby" de 1838 - 1839, de l'ecrivain et sociologue fameux anglais Charles Dickens (1812 - 1870), ou la demoiselle La Creevy parle du probleme du sourire dans les portraits, comme elle est peintre professionnelle de portraits: "En fait, il n'y a que deux types de portraits: le serieux, et celui au sourire dans la peinture de portraits; et on utilise toujours le serieux pour les professionnels, avec l'exception parfois d'acteurs, et le portrait au sourire pour les dames privees et les monsieurs a qui ne les importe pas d'etre vu comme intelligents. " En contraste, conclut Nicholas Jeeves, un sourire ouvert est sans equivoque, un moment indicatif d'etre libre de complexes, comme le polymathe de la Haute Renaissance italienne, Leonardo da Vinci (1459 - 1512) celebre dans une des peintures au sourire les plus celebres dans le monde des portraits, la "Mona Lisa" de 1503, de qui son sourire enigmatique continue a exercer son sortilege et controversie quant a sa signification et contexte. Un second portrait en peinture de Leonardo da Vinci qui a ce meme sourire evasif et indechiffrable, est le portrait egalement en magnifique style sfumato, "Saint Jean - Baptiste" de 1513 - 1516, un sourire qui parait etre une lutte entre contemplation spirituelle et desir sensuel irresolu, tel on le voit aussi dans certains des dessins erotiques du genie polymathe decouvert apres sa mort, ou le soupcon d'etre des auto - portraits reste en soi une controversie continue pour l'enigme du sourire mysterieux, comme le discute dans son livre sur la vie et l'art de Leonardo da Vinci, "Flights of the Mind", "Vols de L'esprit"  l'ecrivain et historien anglais Charles Nicholl, actif comme ecrivain depuis 1980. Leonardo da Vinci etait un des peintres dans la vangarde d'inclure le sourire dans des portraits serieux. Une des raisons que le sourire etait rarement inclus dans les portraits, etait une raison fondalement pratique: une personne qui se faisait peindre un portrait etait obligee de rester immobile pour des longues heures, et un sourire n'est pas une expression en soi, c'est une reponse, et pour cela est difficile de maintenir pour longtemps, sans se transformer en une grimace contorsionnee maladroite et meme penible physiquement. L'invention et ensuite sa popularisation de la portraiture grace a la photographie a changee cette limitation, une fois que les appareils de photo de la seconde partie du XXeme siecle permettaient de faire un portrait dans une fraction du temps que prenait un portrait en peinture et un portrait avec les appareils du XIXeme et debut du XXeme siecles. 

            Le sourire dans le monde de la portraiture a une longue histoire de controversie, pour etre vue a travers des perspectives culturelles et sociales ou sa presence etait pensee comme ne pas acceptable pour des personnes qui se croyaient d'un statut important et de pouvoir. Le sourire n'etait pas vu comme il l'est aujourd'hui, comme un signe de chaleur humaine, de plaisir, de bonte, de bonheur. Au contraire, le sourire etait vu comme etre le domaine des innocents, des pauvres, des acteurs, des personnes considerees obscenes, ivrognes, de faiblesse mentale ou physique. Il y avait des artistes qui contestaient cette attitude, et qui etaient dans la vangarde qui ultimement allait changer cette attitude negative envers le sourire dans les portraits serieux: le peintre sicilien Antonello da Messina (1430 - 1479) et son portrait de circa 1475, "Portrait d'un Homme" fait dans le style chair - oscuro que Leonardo da Vinci avait initiee pour ses fameux portraits, a un sourire evident, mais de compromis, comme les dents ne sont pas visible, comme les dents visibles etaient consideres vulgairs pour un portrait serieux. Le portrait a un ton tres moderne, pour etre fait en presque noir et blanc, comme une photo en portrait contemporain. Des artistes plus connus aussi se risquaient avec vigeur au desir de mettre le sourire dans leurs portraits serieux, comme le rebelle sociale et artistique italien Caravaggio (1571 - 1610) dans sa peinture en portrait de 1602 "Eros Triomphant", une peinture consideree scandaleuse pour le sourire provocatif et decidemment sexuel du jeune protagoniste nu. En fait, la reaction de controversie et outrage etait moins vers le corps nu de l'adolescent, que a cause du sourire ouvert, libre, seduisant. Les peintres des Pays - Bas du XVIIeme siecle  avaient une fascination avec des tableaux qui celebraient la plenitude de la vie, et chercheaient volontiers y mettre le sourire a leurs protagonistes: des peintres comme Frans Hals (1582 - 1666) comme son portrait de 1633 - 1635, "Malle Babbe", et la peintre Judith Leyster (1609 - 1660), et son portrait "Jolly Toper" de 1629. Ces portraits etaient une celebration du sourire, et mettaient ces peintres au centre de la vie contemporaine de leur epoque. Possiblement le peintre le plus accompli dans cette revolution du sourire, fut le peintre holandais Gerrit Honthorst (1592 - 1656) comme est evident dans sa peinture en portrait de 1624 "Le Violoniste Riant" ou le rire du musicien est grand, libre, provoquant une reponse joyeuse au plaisir dans l'observateur. Le sourire avait fait la transition d'acceptation quoique ne pas universelle, dans le monde de la portraiture de la Haute Renaissance, mais l'arrivee du mouvement du Baroque au XVIIeme siecle allait mettre en doute a nouveau, jusqu'a la fin du XXeme siecle et l'arrivee des mouvements modernistes, la validite et valeur du sourire comme un element integral avant - garde dans des portraits artistiques serieux. Il y avait pourtant un moment ou le sourire dans les portrait serieux etait tres visible, et ce fut pendant l'Antiquite. Il y a des bustes et statues anciens grecs et hellenistes de guerriers au sourires magnifiques, avec beaucoup d'expression affective, qui ont du scandaliser par leur franchise, les moeurs du Moyen Age et pour plusieurs siecles apres. Le XXeme siecle avec ses mouvements rebelles comme le pop - art des annees 1960 - 1970, a vu au sourire comme un commentaire sociale, comme dans la serie de peintures portraits de l'artiste americain Andy Warhol ( 1928 - 1987) de l'actrice tragique de Hollywood, Marilyn Monroe ( 1926 - 1962), ou son sourire artificiel d'exaggeration presque comme une grimace aux dents tres visibles, que lui donnait Andy Warhol, voulait suggerer la detresse et le desespoir de la vie personnelle de la starlette fameuse. Le peintre chinois contemporain de Beijing, Yue Minjun (1962) aussi explore le sourire dans sa grande serie d'auto - portraits. Les sourires sont d'une exaggeration qui met mal a l'aise, que l'artiste veut nous faire voir comme une reponse sarcastique au vide de la vie post - moderne. La bouche dans ces auto - portraits est anormalement large, et montre une exuberation exasperee, dans un effort de cacher un bonheur ne pas existant, et donne au visage le ressemblement d'un masque tragique. Interessant de noter, que l'art de Yue Minjun a un public mondial et ses peintures en auto - portraits se trouvent dans des musees a travers plusieurs continents. Il parait que le sourire dans le monde chaotique post - moderne se trouve a nouveau dans l'avant- garde d'une controversie, d'une malaise inquiete et troublante. Le portrait "HAKIM" du photographe berbere d'Aokas Nacer Amari est un portrait d'espoir, est un equilibre tres reussi et vibrant entre les portraits dans l'esprit et le style classique, precis de la Haute Renaissance et son inclusion de la part de ses artistes rebelles italiens et holandais, du sourire. C'est un tres beau portrait qui cherche aller au - dela des angoisses post - modernes, avec une energie de joie, de rayonnant optimsime. Le portrait du photographe kabyle cherche avec determination de vaincre le cynisme post - moderne, un cynisme qui a ses origines dans le traume continu, constant d'une planete assiegee avec les defis enormes qu'affronte notre monde du XXIeme siecle chaque jour a nouveau: le changement du climat global, d'un chisme croissant socio - economique entre les pauvres et les riches, et une direction dangereuse, alarmante vers le fanatisme et l'intolerance, ce spectre horrifiant qui reapparait avec une vengeance, malgre la memoire des horreurs du fascisme du XXeme siecle, les atrocites, les genocides, que ce monstre a permis naitre, suite de son ideologie de mort, de destruction systematique de toute identite, de toute dignite, de toute chance de se sauver de sa militarisation desastreuse, fatale. Ce fanatisme et ses obsessions de vouloir eliminer chaque fois plus, l'identite, la voix, l'histoire, la liberte des cultures qui resistent l'absorption par la machine industrielle anonyme et vorace, ce monstre engendree par le colonialisme et sa progeniture insatiable, qui risque detruire le futur de la planete categoriquement, et qui se cache derriere son masque au grimace tordue du soi - disant progres, du soi disant plus grand bien. La lumiere de la joie, dans toute sa beaute effervescente, son energie contagieuse, et son espoir profond, du portrait "HAKIM" de Nacer Amari est un message convainquant, du fait que Socrate avait raison : "Il n'y a rien plus important que le bonheur", le bonheur qui partage, le bonheur vrai, vibrant, avec toute la beaute et bonte dont est capable l'etre humain quand il se sent libre, et permis d'adherer a son identite, sa dignite, de son coeur, de son corps, de son ame. Le sourire dans ce portrait est une celebration, une victoire de la part d'une culture ancienne qui refuse de se nier le droit a l'histoire et au heritage uniques de sa culture, de son peuple resistant, genereux, intelligent, fier, spirituel, confiant.  

Trudi Ralston 

La recherche sur l'histoire riche et controversiel du sourire dans le monde des portraits, et ses artistes avant - gardes, courtoisie de Wikipedia, ainsi que l'article de Nicholas Jeeves, "The Serious and the Smirk " ( 2013 - 2014) dans la Revue "The Public Domain", et l'information sur la vie et l'art y compris les peintures et les dessins controversiels de Leonardo da Vinci, vient du livre volumineux et tres complet de Charles Nicholl, "Flights of the Mind " de 2004, Viking Penguin publications ( 622 pages). 

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