Tuesday, October 23, 2018

Le Mal est un Metamorphe : Une Promenade avec Aristote et Kamel Daoud

Hier, dans le Quotidien d'Oran, la chronique " Le banc public " de Kamel Daoud " m'a profondement emue. Cette chronique du 22 octobre a la force d'un monologue theatral : il y a un chagrin dans chacque mot, une blessure dans chacque geste intellectuel et litteraire. L'auteur de " La Preface du Negre ", de "Meursault, Contre - Enquete ", de "Zabor ou les Psaumes ", de " Mes Independances ", et  " Le Peintre devorant la Femme " impressionne toujours avec la perspicacite de ses observations, la profondeur aigue de son intelligence, le pouvoir de ses images, la langue unique de ses perspectives. Il y a une determination concentree dans sa passion comme journaliste, comme romancier, qui penetre jusqu'a l'os, qui bouscule l'ame et le corps par l'energie jusqu'a sensuelle des urgences et conflits philosophiques de ses ecrits. Kamel Daoud est un ecrivain qui fascine completement, dans la tradition des grands ecrivains, et qui continue la tradition de la resistance intellectuelle courageuse en Algerie, dont temoigne l'oeuvre litteraire de Kateb Yacine et Albert Camus, d'Amin Zaoui, et les chansons legendaires du chanteur et poete intrepide Matoub Lounes, et la lutte pour la liberte d'expression, avec le risque de l'exile, et dans le cas de Matoub Lounes, la mort par assassinat . C'est un courage puissant qui parait etre difficile d'eviter vu la complexite de l'histoire du pays. Kamel Daoud est tres conscient comme journaliste et romancier de renommee internationale de la condition politique et intellectuelle du monde, et de la tendance vers une resurgence du fascisme, comme c'est malheureusement le cas en ce moment, et c'est avec un degre d'incredulite que je note ce poison meurtrier sans gout ni odeur se melanger dans les recettes politiques des leaders dans des pays qu'on suppose etre des democracies, contradiction frustrante, genante et troublante qui montre un degre d'ignorance historique presque incomprehensible, vu du fait que les memoires des horreurs fascistes de la Segonde Guerre Mondiale devraient etre un avertissement grave et suffisant. Les jeunes vacillent entre une melancholie anesthesiante et une colere destructive, et le pouvoir qui ne voit qu'a travers les lunettes de l'avarice et le narcissisme perverti, en profite. Quoi faire, alors? Je pense a Aristote et sa loi que la nature a horreur du vide. C'est un fait scientifique, et le malheur est que il y a l'abondance d'evidence, que c'est aussi un fait politique, depuis l'Antiquite, et la cause de l'ecroulement de pas mal d'intiatives bien intentionnees. Sur le vide de pouvoir que laisse chacque cause pour le bien affaiblie, se construit l'opportunisme nefaste du mal. Le mal est un metamorphe qui comprend tres bien la loi d'Aristote. Le mal change de costume sans gene, sans hesitation, avec l'aisance que lui permet l'amoralite. Le bien souvent est a un desavantage, car le bien et sa verite a un code de conduite qui resiste de trahir, et qui souvent gagne l'honneur du martyre. Le mal ne supporte pas la verite, et se nourrit de mensonges, comme se rendait bien compte l'ecrivain russe Aleksandr Solzhenitsyn ( 1918 -2008 ), qui a recu le Prix Nobel pour la litterature en 1970, et qui a dit : " Les mensonges ne se couvrent que par la violence, et la violence ne peut se cacher que derriere les mensonges". Bien dit de la part d'un intellectuel et ecrivain qui avait passe des annees dans les camps stalinistes, qui a ete expulse de L'Union Sovietique en 1974 pour ses defis face a l'interdiction de la liberte d'expression,  et qui avait survecu un attentat a sa vie avec l'agent biologique de ricine en 1971, qui lui avait presque coute la vie. Son chef- oeuvre, le livre immense " L'archipel du Goulag " est considere un des oeuvres litteraires les plus importantes du XXieme siecle, et son livre " Un Jour dans la Vie d'Ivan Denisovich " de 1962,  qui est la chronique d'un jour dans la vie d'un prisonnier dans le systeme goulag sovietique est grave dans ma memoire. Le mensonge decourage, vide l'energie, l'optimisme, de ceux qui se rendent compte que ce mensonge est une maniere d'indoctriner le desespoir. Le desespoir est le spectre qui tue tout, et qui permet le mal de fleurir, parceque sans espoir, il n'a a pas, ou plus de resistance. Kamel Daoud inspire, en Algerie, en Europe, aux Etats Unis aussi, c'est un journaliste et ecrivain auquel on a interet de faire attention, car ce qui lui tourmente de la situation dans laquelle se trouve l'Algerie, dans cet impasse qui trouble l'espoir pour un futur valable et croyable, c'est la meme situation dans laquelle se trouvera une grand part du monde, si nous continuons de hausser les epaules a la facon sinueuse dont le bien est mis a cote par le mal qui devient plus arrogant et plus fort chacque jour, par le mal traitement des plus faibles, des plus vulnerables de Myanmar a la Syrie, de la Palestine a Yemen, de Venezuela a Puerto Rico, des enfants immigrants arretes a la frontiere du Mexique, aux abus et la violence que souffrent les populations minoritaires dans les grandes villes du monde. Il y a cette phrase dans la serie science - fiction americaine pour la television , " Star Trek : The Next Generation ", ( 1987 - 1994 ) cree par Gene Rodennberry ( 1921 - 1991 ) et qui fut un grand succes. Dans la serie, il y a entre autre une race de cyborgs qui a comme but d'assimiler tout l'univers, de faire des cyborgs de toutes personnes sur toutes les planetes, dans toutes les galaxies. Leur mantra est : " Resistance is futile " : " Il est inutile de resister ". Je pense a Kamel Daoud, a son courage, comme journaliste, comme ecrivain. Il resiste avec toute son ame, tout son etre. Il a raison. Resister est la seule facon. Chacque fois que Kamel Daoud ecrit une chronique, il resiste. Chacque livre qu'il ecrit est une declaration de sa conviction de l'importance de resister, d'encourager la resistance a travers l'inspiration de ses ecrits et leur message. C'est un chemin difficile, meme dangereux, mais il n'y a pas d'autre alternative. La seule alternative est le silence, un silence qui tue, tres lentement, tout, et qui reduit le bien a un robot dans le service du mal.
Kamel Daoud n'a pas peur, et c'est ce qu'il faut pour resister, et c'est cette perte de la peur qui est la seule chose de laquelle le mal meme a une peur pathologique, et qui permet que le bien ait ses triomphes aussi, comme en temoignent les democracies sinceres qui sont encore en vie, qui sont nouvelles nees memes, malgre les defis, les difficultes, comme est le cas pour la Tunesie, un pays qui est juste a cote de l'Algerie.
Trudi Ralston 

L'information pour la recherche sur l'ecrivain russe Aleksandr Solzhenitsyn et son oeuvre,courtoisie de Wikipedia, ainsi que l'information sur le scenariste et producteur americain Gene Rodennberry.


No comments:

Post a Comment