Dans une de mes classes pour la ceinture noire de l'art martial coreen de Tae Kwon Do, de cela il y a une dizaine d'annees, notre grandmaitre parlait de l'importance dans le combat de savoir maitriser le silence, pour eviter que l'ennemi decouvre votre position strategique. Il s'agissait de l'art japonais en fait, des shinobi, mieux connu sous le nom populaire de ninjas. L'art des shinobi est associe avec la capacite de s'approcher a un ennemi sans qu'il s'en apercoit, ce qui prend beaucoup de patience, intelligence et technique. Les shinobi ou ninjas avaient 10 facons de marcher, pour minimaliser le bruit du mouvement. Ils etaient actifs au Japon entre le XVeme et XVIIeme siecles, et leurs talents furent reconnus par les samourai, la classe de guerriers dirigeante qui dominait le pays et qui a retenu son aure de reverence presque mythologique. Les ninjas vivaient dans les montagnes, ce qui les preparait tres bien pour les techniques de l'escalade, necessaire pour monter les sentiers menant vers les chateaux perches haut sur les roches presque inaccesibles des seigneurs en conflit des differents clans aristocrates de samourai. Le 9 aout Fodil Bousba, secretaire general du groupe culturel et sportif des Randonneurs des Babors, Bejaia a partage un bel album de 30 photos qui inclut comme treizieme photo une vue magnifique de la base du grand Ait Mokrane Mohamed, connu comme el Mokrani, ne en 1815 a Kalaa des Beni Abbes, et mort le 5 mai 1871. Cheikh El Mokrani fut un des chefs des revoltes contre l'occupation coloniale francaise en Algerie. Il fut l'issu du dernier sultan hafside de Bejaia, Abou El Abbes Abdelaziz. Survenu au combat, comme acteur essentiel de l'insurrection de la Kabylie en 1871, il est enterre dans la cour de la mosquee de Djamaa El Kebir a la Kalaa des Beni Abbes, un site d'importance historique cruciale, que l'Association de wilaya tourisme et culture de Bejaia, les Randonneurs des Babors, Bejaia ont honores avec une randonnee, et dela la photo de Fodil Bousba, qui montre le site legendaire du grand Cheikh El Mokrani. La photo m'a fait rappeler ce moment ou notre grandmaitre expliquait l'importance de savoir s'approcher a un ennemi. Le peuple berbere a une renommee historique qui remonte des milliers d'annees, pour fatiguer l'ennemi, il a rendu fou aux romains et leur empire immense, et les francais ont perdu la guerre de l'Independance, et la resistance et la determination de la resistance berbere fut essentielle dans cette guerre longue et difficile de 1954 a 1962 qui a donnee la victoire a l'Algerie. Les montagnes de la Kabylie restent un symbole puissant de l'esprit resistant berbere, du courage, de la dignite du peuple algerien. Les deux clans de ninja les plus fameux du Japon de XVeme au XVII eme siecles furent les Iga et les Koya, et les ninjas furent entraines des l'enfance. En Kabylie, les randonneurs souvent representent plusieurs generations qui transmettent l'importance culturelle et historique de l'escalade dans les montagnes comme une source de sante, de communaute, de partage, d'identite et de dignite. Les montagnes en Algerie sont les sentinels du peuple, les temoins et les gardiens du passe, du present et du futur. Quand j'etais adolescente en Belgique, mon pere nous ramenait a mon fere et mes deux petites soeurs en Autriche, dans les montagnes de Tyrol pres de Innsbruck, pour des vacances et des randonnees dans les montagnes. Ce sont parmi mes souvenirs les plus cheris. L'air fraiche, l'esprit de communaute dans les villages, la beaute de faune et flore, et le silence magnifique des montagnes, et le son des petites sources d'eau fraiche et froide le long le sentier sous le soleil et un ciel immense et bleu, c'etait etre pour un peu de temps au portail du paradis. En ayant decouvert la nature sublime en Algerie, en Kabylie a travers la photographie de mes amis et amies photographes et randonneurs et randonneuses, et le lien intime entre la nature et l'histoire heroique du pays, mon ame de poete et ecrivaine a trouvee son identite, son destin. Les montagnes inspirent la sagesse, la reflection, et les mots de Fodil Bousba sont une affirmation de ce fait indisputable :
" Il faut voir doucement, il faut ecouter au lieu d'entendre. " Il m'a fallu une vie entiere pour retrouver le silence de paix et tranquilite, d'appartenance, pour mon etre creatif , en Algerie et dans la sagesse de son peuple et son coeur et esprit grand et genereux, je suis capable d'etre moi - meme, je retrouve ma dignite, ma joie intellectuelle et emotionnelle. En anglais il y a une expression " Home is where the heart is " : " Le Chez soi c'est la ou vit ton coeur ". L'Algerie a mon ame et mon coeur. Plus de 800 pages publies de prose et poemes le prouvent, et j'ai commencee la recherche pour mon prochain livre, qui sera sur les temoignages de la Guerre de l'Independance, de la memoire de familles et de survivants. C'est un mystere profond pour moi, cet accueil de ce vaste pays qu'est l'Algerie, qui sait accommoder mon identite et mes talents quand aucune autre culture ou pays a su le faire. " Il faut voir doucement, il faut ecouter au lieu d'entendre ". Fodil Bousba le sait, le comprend. Il m'a pris toute une vie d'avoir la chance, de recevoir la grace de comprendre la sagesse de ces mots, et d'avoir la chance de suivre son courage, son bonheur. Sur les traces du silence, sur les pas legers de la sagacite, d'un petit village flamand au Texas, et ensuite a l'etat de Washington, a travers un desert immense de solitude, pour trouver, dans les exigences et defis du silence de tant d'annees, une voix qui me permet de faire hommage a un pays, a une culture, a une nature, a une histoire, a un peuple unique, fier, beau, intelligent, resistant, qui habitent ce pays qui invite l'ame et le coeur pour y rester, le meme que les etoiles invitent la nuit et la lumiere du soleil invite le matin.
Trudi Ralston
L'information sur Cheikh El Mokrani, courtoisie de Wikipedia et la photo de Fodil Bousba. L'information sur l'histoire des shinobi, mieux connu comme l'histoire des ninjas, courtoisie de Ninja Encyclopedia et Wikipedia.
No comments:
Post a Comment