Tuesday, July 27, 2021

C'est le Visage Deforme qui revele les Fissures dans le Miroir: "Le Clown" de Nacer Amari - dans la serie "L'Esprit Vagabond"

                 Je me rappelle encore le rythme lent du livre, j'avais l'impression d'etre la seule temoigne, assise a cote d'une scene de theatre, ou je me trouvais face a l'auteur, qui me recitait son livre de facon absorbee, avec une voix reflexive, triste. J'avais juste fetee mes 16 ans, et je lisais "Ansichten eines Clowns", "Le Clown" en francais, de l'auteur allemand Heinrich Boll (1917 -1985), un roman qui traite du desillusionement apres la Seconde Guerre Mondiale et le traume des horreurs qui allait definir l'oeuvre de l'auteur qui est considere etre un des ecrivains les plus importants de sa generation. Heinrich Boll fut ami de l'auteur russe Aleksandr Solzhenitsyn ( 1918 - 2008), lui aussi un ecrivain qui serait temoin des tumultes laissees par la Seconde Guerre Mondiale, et la terreur du regime sovietique sous la dictature de Joseph Stalin. Heinrich Boll vivait les horreurs comme soldat, ainsi que Aleksandr Solzhenitsyn, et l'ecrivain russe allait aussi subir huit ans comme prisonnier politique dans le systme de goulag, les camps de concentration stalinistes, simplement pour le fait d'avoir critique a Stalin dans une lettre privee. L'ecrivain allemand recoit le Prix Nobel pour la litterature en 1972, et l'ecrivain russe le recoit en 1976, pour son oeuvre immense " L'Archipel du Goulag" ecrit entre 1958 et 1968, et qui  estune histoire detaillee et precise sur le systeme punitif russe, commence sous les tsars, et qui allait atteindre le sommet de son pouvoir sous la dictature de terreur de Stalin. C'est cette oeuvre qui a force l'exile vers l'Allemagne pour Aleksandr Solzhenitsyn en 1974, et c'est chez Heinrich Boll qu'il a ete heberge, pour apres aller vivre aux Etats Unis de 1976 jusqu'a 1994, quand l'auteur russe a ete permis de retourner en Russie, sous le nouveau esprit de detente politique commencee sous Mikail Gorbachev ( 1931),  dernier premier ministre de 1985 - 1991, de l'Union Sovietique, avant sa dissolution en 1987.  Comme l'ecrivain et dramaturge irlandes, Samuel Beckett ( 1906 - 1989) qui ecrivait en anglais et francais, et vivait et travaillait a Paris pour la majorite de sa vie adulte, Aleksandr Solzhenitsyn et Heinrich Boll traitaient dans leurs livres et poemes sur le sujet dues tumultes sociales, politiques et existencielles qu'avait laissee la Seconde Guerre Mondiale, sur le sujet du desespoir, et la lutte pour la volonte de survivre, face a l'absurdite des defis, face a "l'incomprehension et incomprehensibilite du monde". Le theatre de Samuel Beckett etait considere l'apex du theatre de l'absurde, qui surgit des traumes et complexes apres la Seconde Guerre Mondiale. Pendant la Seconde Guerre Mondiale, Samuel Beckett etait membre de la Resistance francaise comme courier et fut attrappe presque 4 fois par le Gestapo, apres ce risque, il cacheait des armes pour la Resistance. Heinrich Boll detestait le regime Nazi, et la destruction de sa ville de Cologne laisserait a l'auteur traumatise pour la vie.  Aleksandr Solzhenitsyn, comme communiste convaincu, deplorait la terreur du Stalinisme, et Samuel Beckett deplorait le vide du monde moderne apres la guerre. Solzhenitsyn avait vecu le combat comme soldat bolshevique, et Heinrich Boll avait ete blesse 4 fois, et le typhus l'avait presque coutee la vie, les deux hommes avaient vu de pres les atrocites de la guerre. Lire le livre "Le Clown" de Heinrich Boll, comme adolescente, sur la desillusion d'un jeune clown talentueux degoute avec les hypocrisies d'une societe allemande hors d'equilibre, qui chercheait a effacer les horreurs de l'Holocauste, a se cacher derriere une absolution justifiable, a laissee une impression permanente sur mes sensibilites intellectuelles et creatives aussi. Heinrich Boll luttait avec conviction contre les abus des droits de l'homme, contribuyait aux pauvres de sa ville natale de Cologne, et avait une affection et respect grands pour la nature, et le besoin de la sauvegarder contre les instincts destructifs et avares de l'homme du XXeme siecle. Il avait une grandre affection pour la nature de l'Irlande, pays de naissance de son collegue Samuel Beckett, et y avait meme une maison, et son livre "Journal Irlandes" que j'ai lu l'annee suivant, a l'age de 17 ans, est une eloge poetique et touchant de son amour pour ce pays intrigant. Heinrich Boll etablit une grande renommeee comme ecrivain, mondialement et aussi dans son pays natal, ses livres sont traduits en plus de 30 langues et il reste un des ecrivains le plus lu en Allemagne. Aleksandr Solzhenitsyn etablit aussi une enorme renommee, son livre "L'Archipel du Goulag"  de qui sa publication fut autorisee par le premier ministre russe Nikita Khrushchev (1894 1971)  dans un effort de guerir les cicatrices dans la conscience et existence russe laissees par le regime staliniste, vendait plus de dizaines de millions de copies. Comme adolescente je me sentais le plus proche a l'oeuvre de Heinrich Boll de ses trois auteurs, une fois a l'universite, j'ai aussi exploree les livres de Aleksandr Solzhenitsyn, comme " Un jour dans la vie de Ivan Denisovich" et " Le Veau et la Chene" un livre enorme, qui traite des efforts de l'ecrivain dissident de proteger ses manuscrits du KGB, et de les sortir du pays, parfois dans des pieces de papiers minuscules, a travers le cours de beaucoup d'annees. Un testament de la force de la volonte et resistance intellectuelle de cet auteur qui me laissait emerveillee. Des livres de Heinrich Boll, " Journal Irlandes" ( 1957), " Le train etait a Temps" (1949) et " Le Clown" ( 1963), que j'ai lu comme adolescente entre l'age de 16 et 18 ans, le livre "Le Clown" m'a profondement emue, pour son protagoniste jeune, d'une vintaine d'anees, et ses tourments a cause d'un amour malheureux, et son refus tetu de compromettre ses convictions face aux hypocrisies sociales et morales de sa famille et son entourage. Il n'est pas pris au serieux par son pere, ou autres membres de sa famille, pour etre un clown professionnel talentueux. Le recit est lent, profond,  comme un tableau qui se peint avec un pinceau soigneux, pensif, et je me rappelle encore vivement son ambiance melancholique, rebelle, avec ses touches de l'humour aussi tragi - comique, de son identite de clown meprise, ne pas compris. 

                   Cette exloration elaboree est pour introduire le protagoniste de mon article: le portrait discordant, brulant "Le Clown" du 25 juillet 2021, du photographe berbere Nacer Amari de Tassi Photographie. Ce portrait est d'un clown au maquillage et costume de couleurs carnivalesques, du clown desequilibre dans le film de 2019 " Joker" avec l'acteur de Puerto Rico Joaquin Phoenix (1974) dans le role principal, qu'avant lui l'acteur australien Heath Ledger (1979 - 2008) avait rendu legendair. Ce portrait du photographe d'Aokas evoque pour l'intensite de l'expression exageree du sourire etendue gros plan, et la malaise visuelle que l'effet de l'echo visuel du rire grotesque suggere, le monde de l'expressionnisme dans la peinture et la photographie, ce qui nous donne le lien avec les livres de Heinrich Boll, et sa preoccupation avec l'absurdite existentielle du monde de la seconde partie du XXeme siecle, de qui ses reverbations continuent jusqu'a aujourd'hui. Comme le surrealisme a vu sa naissance comme reponse intelllectuelle et artistique - sociale aux horreurs de la Premiere Guerre Mondiale, l'xpressionnisme fut l'enfant rebelle du cauchemar et genocides de la Seconde Guerre Mondiale. Le portrait "Le Clown" de Nacer Amari met au centre les couleurs intenses et provocantes du visage au teint epais aux lignes grotesques autour des yeux et de la bouche, qui exaggerent leurs contours et expression de hilarite gonflee, torturee, qui rappelle les portraits des peintres expressionnistes avantgardes comme de l'artiste autrichien, Egon Schiele (1890 - 1918) connu pour l'intense sexualite de ses portraits et auto - portraits, et qui fut un etudiant du peintre symboliste Gustav Klimt. Il fut influence aussi par le peintre Oskar Kokoschka ( 1886 - 1980), dans l'audace des lignes et couleurs. Le jeune Egon Schiele, est mort a l'age de 28 ans, victime de la pandemie de 1918 - 1920, et ses ravages en Europe.  Oskar Kokoschka etudiait les arts a l'universite de Vienna, et une fois fini ses etudes, enseigneait des cours sur les arts visuels. Il croyait dans le lien entre une vision interieure et une perspective optique, ce qui etait aussi la pholosophie litteraire de Heinrich Boll. Cette perspective sur l'art etait aussi au centre de l'art du symboliste moderniste post - impressionniste, Wassily Kandinsky (1866 - 1944). Oskar Kokoschka etablit sa reputation comme peintre avant garde en 1908, suite d'une exposition d'une serie de lithographies erotiques, autour du theme de l'amour adolescent. Cette serie lui causait d'etre expulse de l'universite a Vienna, ce qui lui precipitait dans le monde des artistes avantgarde qui lui voyaient son talent et esprit libre, audace. Les lithographies " Die Traumenden Knaben", ce qui se traduit comme " Les Reves de la Jeunesse", etaient en celebration de son amour pour une jeune camarade etudiante a son ecole, une fille au nom de Lilith, qui etait suedoise, et etaient inspires par un poeme lui ecrit en 1907. Les lithographies montrent l'influence de l'art symboliste de Gustav Klimt ( 1862 - 1918), lui aussi victime de la pandemie de 1918 - 1920, et l'influence du sculpteur belge George Minne ( 1866 - 1941), pour l'angularite des corps des adolescents et fut une declaration definitive vers l'expressionnisme et une rupture definitive aussi, pour Oskar Kokoschka, avec le style du Jugendstil, l'art nouveau, en vogue dans le monde des arts entre 1890 et 1910, un style initie en Belgique et suivi en France apres et a travers l'Europe. George Minne etait le beau pere de ma tante Agnes De Cauter, soeur de ma mere et de mon oncle peintre surrealiste Frans De Cauter ( 1920 - 1981)  Ma tante Agnes (1926 - 2004)  etait l'epouse de Frederick Minne ( 1907 -1978),  le fils de Georges Minne, de 1964 a 1978, et avant etait l'amante de l'ami de mon pere, le peintre expressionniste flamand Raoul van Den Heede ( 1924 - 1999). Les arts, surtout le surrealisme et l'expressionnisme etaient une grande partie de mon education artistique des mon enfance, et rendrait pour moi presque intuitif le lien entre la peinture et la litterature quant au style et intention de mes poemes et leurs visions et energies. " Le Clown" de Heinrich Boll etait un pas important dans mon appreciation de l'expressionnisme comme un art qui me donnait un contexte au monde apres la Seconde Guerre Mondiale qui fut mon heritage et une passion pour mon pere et son interet dans les artistes flamands expressionnistes, comme son ami et protege, Raoul Van den Heede. 

                  Le portrait "Le Clown" de Nacer Amari, le livre " Le Clown" de Heinrich Boll, et les portraits discordants, intenses de Oskar Kokoschka, ont un lien qui les unit: l'ecrivain Heinrich Boll chercheait a communiquer l'urgence de guerir et accepter les blessures et traumes psychologiques et physiques, sociales, intellectuelles de la Seconde Guerre Mondiale. Le peintre Oskar Kokoschka montrait dans son art aussi le vide et les angoisses du monde apres 1945, dans les couleurs criants de ses portraits, dans les visages tortures, mal a l'aise, detachee affectivement de leur corps, de leur esprit, du monde fracturee qui les devorait, les isolait l'un de l'autre. Le monde d'apres la Seconde Guerre Mondiale etait un monde de divisions, d'incertitudes, de certitudes brisees, de dangers futurs de pouvoirs qui chercheaient a restaurer des gloires du passe, des convictions a venger. Nacer Amari comme artiste photographe ne apres la Guerre de l'Independance de 1954 - 1962 en Algerie, ayant grandi comme enfant et adolescent dans l'ombre de la Decennie Noire de 1991 - 2002, vit dans les sensibilites intellectuelles et sociales d'un pays qui a vu son ame dechiree deux fois en moins de 70 ans, de qui les blessures des horreurs des deux geurres restent visibles dans la nature du pays, dans les villages kabyles vides et les villages kabyles qui se revivent le coeur et les communautes, dans les efforts que le peuple algerien exprime pour un futur vivable pour ses enfants. Egon Schiele, le jeune peintre expressionniste avantgarde, a perdu sa vie dans la pandemie de 1918 - 1920, comme son inspiration et collegue, Gustav Klimt, et le monde se trouve dans l'incertitude de la pandemie du Covid, qui laisse ses ravages partout sur terre, exactement 100 ans apres la derniere pandemie. Une pandemie est comme une guerre, il n'y a pas de direction, pas de sens, au contraire, il parait, que juste comme dans une guerre, c'est l'egoisme, l'indifference, l'avarice qui determine le sentier du chaos et il parait que les dirigeants de la terre ne sont pas plus charitables qu'ils l'etaient pendant la Guerre de l'Independance et la Decennie Noire en Algerie, que pendant la Seconde Guerre Mondiale 1940 -1945, et les guerres suivantes qui depuis tourmentent la terre, comme la desastreuse geurre civile en Syrie qui continue depuis maintenant 10 ans. Les clowns gentils souffrent en silence, les clowns psychopathes brulent et controlent la terre. C'est le visage deforme qui revele les fissures dans le miroir. Dans un de ces enigmes du destin, la seule consolation de guerres, de pandemies, de chaos, est que souvent ils sont la catharsis pour une renaissance de l'esprit libre, des arts, de mouvements courageux pour la justice, l'egalite, la dignite, la charite, les valeurs de charite, de communaute, de partage. "Le Clown" de Nacer Amari est un appel du besoin de se reveiller, comme famille terrestre, du besoin de ne pas se laisser seduire le coeur, et l'esprit par le bruit cacophonique qui vient du centre du vide, qui ne veut pas que ce soient les clowns innocents et gentils qui se reveillent, mais les clowns psychopathes, qui hurlent leurs insultes et ordres derriere des masques qui cachent les fissures des miroirs que leurs maquillages lourds refletent. Comme les vampires, ils ne veulent pas qu'on se rende compte qu'ils ne sont plus capables de se voir l'image, qu'ils n'ont pas des ames, et ne peuvent que se contortionner le visage vide et les yeux morts qu'a travers des grimaces ecoeurantes.    

Trudi Ralston

La recherche sur les ecrivains Heinrich Boll, Aleksandr Slozhenitsyn, et Samuel Beckett, courtoisie de Wikipedia, ainsi que la recherche et information sur les peintres Oskar Kokoschka, Egon Schiele, et Gustav Klimt.  Quant a l'histoire de l'humour, qui est aussi un aspect du personnage du clown, voir mon article du 23 mars 2021, sur le portrait de Justou de Nacer Amari: " La Clef du Sphinx: Le Portrait Evocatif de Justou de Nacer Amari", dans la serie "La Maison aux Fenetres Invisibles".     

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